Découvrez l’interview d’Antonia Neyrins carnettiste, auteur et illustratrice de carnets de voyage… une rencontre inédite et inoubliable.
Qui êtes vous ? Quel voyageur êtes vous ?
Antonia Neyrins, c’est mon nom d’artiste. Je suis carnettiste, c’est à dire auteure illustratrice de carnets de voyage. Je suis une voyageuse dans l’âme et dans la vie réelle depuis ma plus tendre enfance. Je suis nomade, citoyenne du monde et curieuse des autres cultures.
Voyagez vous seul (e) ? accompagné(e) ?
Seule, en couple, en famille, avec des enfants, avec des ami(e)s, avec des collègues de travail ou avec des adultes souhaitant pratiquer l’art du carnet de voyage, j’ai tout expérimenté. Je préfère voyager en couple car j’ai besoin d’échanger et de vivre les émotions du voyage avec quelqu’un de proche. Seule, j’ai l’impression de ne pas « partager » le bonheur de voyager.
Comment est née votre passion du voyage et du carnet de voyage?
Comment vous est venue l’idée de croquer des carnets de voyage ? Quel a été votre premier voyage ? Vos impressions premières ? Mon premier carnet de voyage date de mon premier voyage. J’avais huit ans, je suis partie seule à la rencontre de ma seconde culture, celle de mon père, dans l’Espagne franquiste de Franco. Je passais mes journées avec ma tante, Teodora, qui ne parlait pas un mot de français (je ne parlais pas espagnol non plus). Cette plongée dans une culture qui m’était étrangère tout en étant mienne (la Feria, la corrida, les calamars à l’encre, l’absence de mixité à la piscine, l’interdiction aux femmes de porter le pantalon…) m’a incité à écrire, coller et dessiner dans un cahier d’écolier. C’était mon premier « carnet de voyage » à la découverte d’une autre culture. Je n’ai eu qu’une envie après ce voyage : être artiste et ethnologue tout à la fois, ce qui n’a pas été tout à fait le cas une fois adulte puisque j’ai fait une Ecole de Commerce. Un peu par hasard, j’ai obtenu un poste dans les Ressources Humaines à l’Ambassade des Etats Unis où je gérais trois continents et j’ai voyagé pendant 16 ans tout en ayant la grande chance d’avoir des collègues qui me faisaient découvrir leur pays en dehors des sentiers touristiques (d’ailleurs la plupart des pays où je suis allée n’étaient pas des pays touristiques).
Pourriez vous nous présenter votre blog/travail ?
Mon travail est multitâche :
- J’écris et j’illustre des carnets de voyage, des livres pour enfants, mais aussi parfois des articles de presse ou de magazine.
- Je suis en résidence dans des médiathèques, des villes ou à l’étranger pour faire découvrir et pratiquer l’art du carnet de voyage.
- J’accompagne des groupes d’adultes réaliser un carnet de voyage à l’étranger.
- J’expose mes carnets de voyage dans mes médiathèques en France et à l’étranger.
- Il m’est arrivé de faire quelques traduction (de l’anglais vers le français) de BD et de Comics.
Quelles techniques utilisez-vous pour vos carnets de voyage?
Au départ, j’ai surtout utilisé l’aquarelle et le pastel gras (qui n’est pas facile à utiliser car il fond vite, tâche et salit). Depuis 5/6 ans, j’utilise surtout l’encre de Chine (préparée moi-même à partir de pigments et d’ingrédients divers achetés au Maroc) et l’aquarelle. Sinon, on retrouve dans tous mes carnets d’innombrables (et parfois d’improbables) collages (notamment de timbres), et de la calligraphie (arabe, chinoise ou latine).
Quel à été votre dernier voyage ? Pourquoi ce choix ?
Mon dernier voyage a été le Congo (Brazzaville). C’était un choix d’ordre personnel, contrairement à la plupart des voyages que je fais, et qui sont le résultat d’une invitation à voyager (de la part d’un organisme officiel comme une bibliothèque, ou le service culturel d’un gouvernement étranger ou d’une ville.
Pouvez vous nous raconter une anecdote de votre dernier voyage ?
Un chauffeur de taxi n’a pas voulu me prendre à bord de son véhicule parce que, étant blanche, j’allais le salir. Heureusement, les personnes qui m’accompagnaient l’ont convaincu du contraire.
Avec vous un ou des pays de prédilection ?
Même si j’ai voyagé sur presque tous les continents, j’ai plusieurs sujets de prédilection : les régions insulaires, la France d’Outremer et le continent africain.
Quelles sont vos plus belles rencontres faites sur la route?
La rencontre avec les autres c’est toujours ma plus belle rencontre. Comprendre une autre culture (même un tout petit peu), découvrir une gastronomie, une autre façon de s’habiller, de vivre, d’autres critères de beauté, une autre forme de politesse. Découvrir des points communs, des différences aussi. Je suis curieuse de tout cela. J’aime la rencontre humaine, le paysage m’importe peu finalement. L’un de mes plus beaux voyages a eu lieu en Ethiopie, dans la Vallée de l’Omo. J’ai vécu deux semaines avec des peuples premiers, qui vivent comme à l’époque préhistorique en pleine nature hostile. J’ai reçu une grande leçon de vie à leur contact.
Quel paysage vous a le plus marqué ?
La Polynésie française. J’ai été subjuguée par la déclinaison des verts en altitude et les dégradés de l’eau du lagon variant du cristal le plus pur au turquoise le plus vif.
Sur la route, comment communiquez vous avec les autres ?
En français, en anglais, en espagnol, en arabe, en créole quand je peux ou en prononçant les quelques mots que j’ai appris dans la langue du pays que je découvre. Quand je suis vraiment très loin, et que je ne bredouille aucun mot dans la langue des gens que je croise, avec le sourire, la voix (je parle en français même si on ne me comprend pas, il m’arrive même de chanter parfois), le dessin. Je pars du principe que n’importe quel être humain me comprendra, ou en tous cas, comprendra mes besoins les plus élémentaires (être en sécurité, manger, dormir). Pour le reste, je fais confiance à ma bonne étoile et à l’Humanité des gens que je rencontre (et à leur hospitalité, souvent bien plus grande que la notre, occidentaux).
Quel est votre livre préféré sur le voyage ?
Je suis incapable de ne citer qu’un seul livre. « La ferme africaine » de Karen Blixen (1937). « Terres d’Ebène » d’Albert Londres (1929). « Ebène : aventures africaines » Ryszard Kapuscinski (2000)
Quel est votre film favori sur le voyage ?
« Carnets de voyage » de Walter Salles. « Le chien jaune de Mongolie » de Byambasuren Davaa.
Quel serait le «voyage de vos rêves» ?
Ce serait de ne plus voyager, mais de vivre ailleurs. De préférence, sur le continent africain, ou en Guadeloupe.
Selon vous, quels sont les indispensables à emporter en voyage ?
Un carnet, une boite d’aquarelle, une lampe torche, une trousse de médicaments indispensables, de bonnes chaussures, des tongs pour la douche, un répulsif anti-moustique, une crème solaire, une visière pour les yeux, un pagne (ou un grand foulard) pour s’asseoir partout, un guide de conversation de la langue du pays et votre plus beau sourire.
Quels conseils donneriez vous à un voyageur qui part pour la première fois sur la route ?
D’être serein, d’avoir confiance, mais d’être attentif. Je n’ai jamais été malade en voyage, je fais très attention à l’hygiène (qui n’a rien à voir avec le confort). Je respecte les règles élémentaires en matière sanitaire, et j’écoute beaucoup les conseils des gens sur place, qui savent ce qu’il faut faire et ne pas faire. Parce que le plus beau des voyages peut être irrémédiablement gâché par une maladie ou un accident.
Quelle serait votre devise autour du voyage ?
La devise de ma famille paternelle s’applique à tous les voyages : « Respecta para que te respectant ». Respecte pour être respecté : c’est finalement la clé de la vie, qui est le plus beau et le plus merveilleux des voyages, le seul qu’il ne faut pas rater.
Quel est votre carnet de voyage préféré chez « Carnet du voyageur » ?
Tous ! Quelle question, l’idéal serait d’avoir toute la collection, non ? Bon, plus sérieusement, leurs noms évocateurs et la couleur des cuirs rendent le choix vraiment difficile. Je citerai mes trois préférés, dans l’ordre, le poète d’un beau bordeaux, le globe trotter vert anis et l’exploratrice rose fushia. J’arrête car je meurs d’envie de continuer la liste.